Explications de la série "Organismes 2ème
génération"
Série de photos "Organismes 1ère génération
" et " Organismes 2ème génération
"(2000/2001)
Le
progrès des technologies touchant au vivant ouvrent à
toutes les recherches concernant le corps humain, un nouveau et
vaste terrain d'exploration et d'expérimentations.
Que deviendra, dans ce contexte, notre perception et notre rapport
à ce corps futur manipulable ?
Ces nouvelles possibilitées (greffes,autogreffes, clonage,
thérapie génique, thérapie cellulaires, organogénèse...
)génèrent fictions et spéculations de tout
ordre...
Ce sont les espoirs, fantasmes et angoisses issus de ces fictions
que représentent les étranges créatures qui
flottent dans les séries de photos "Organismes 1ère
génération" et Organismes 2ème génération"
.
Dans
la série "Organismes 1ère génération"
elles sont issues du corps humain. Plus précisément
de morceaux de main, pieds, coudes et genoux qui semblent s'être
développés anarchiquement, en totale autonomie du
reste du corps, dans un espace froid, aquatique et laborantique.
Les
créatures de la série "Organismes 2ème
génération" sont des hybrides de corps humain
et animal, qui interrogent nos doits et nos devoir par rapport aux
êtres vivants , compte tenu de nos nouvelles et futures possibilités
offertes par les biotechnologies.
(Les
bio-sciences nous offrent de nouveaux pouvoirs sur les êtres vivants
et donc, sur nous mêmes. Notre façon de les aborder est délicate
et controversée. Les politiques à appliquer dans ces domaines sont
tout juste esquissées et absolument pas accordées. Nous avançons
sur un terrain sensible et inexploré, fascinant, attirant et dangereux,
vecteur de toute sorte d 'angoisses et fantasmes.
C'est
un type de situation où l'art peut prendre, à mon sens, prend un
rôle essentiel : celui d'être un observateur critique et suspicieux
pointant les faits importants et essayant de formuler les bonnes
questions. J'utilise cette situation comme une porte ouverte à l'imaginaire.
Elle me permet d’ aborder la réalité future par l'intermédiaire
d'images « biofictionnelles ». En faisant appel à nos peurs et nos
fantasmes, celles-ci pourraient nous aider à les dépasser et nous
donner envie de comprendre la révolution du vivant qui est en route...
)
Les
créatures qui flottent dans la séries de photos « Organismes 2ème
génération » sont des hybrides de corps humain et animal. Les «
morceaux » humains y sont presque absents. Ce sont avant tout des
hybridations de 2, 3, 4, ou 5 animaux issus de biotopes différents
(terre, eau…).
Diverses parties de corps de vache, cochon, poulet, mouton, lapins,
crabe et poisson fusionnent en d’aléatoires et monstrueuses compositions.
C’est un procédé optique utilisant, notamment, les propriétés de
l’eau qui permet à ces divers morceaux de viande, d’organes, et
d’os d’avoir l’aspect organique et assez réel des créatures mutantes
de la série « Organismes 2ème génération ».
L’espace
vert /bleu, sale et un peu trouble dans lequel les monstres semblent
flotter évoque l’aspect froid et mal aseptisé d’une espèce de laboratoire.
La dureté, la blancheur et l’intensité de l’éclairage, qui change
souvent de direction d’une photo à l’autre transcrit une démarche
d’étude, d’analyse scientifique de ces créatures qui semblent pour
certaines déstabilisées et surprises par le face à face avec l’objectif.
Le processus de réalisations, lui même, se rapproche en plusieurs
aspects d’une ambiance clandestine desmanigances d'un généticien
fou.
D’une
part, la récupération des matériaux de base (voir image ) est rendue
difficile par les récentes mesures de sécurité et de prévention
concernant le boeuf et le mouton. Des règles strictes auxquelles
sont soumises les abattoirs pour la destruction par incinération
de certains éléments non propres à la consommation rendent difficile
tout « emprunt » de matières organiques. C’est paradoxalement souvent
avec des produits « bio » que je travaille, récupérés beaucoup plus
facilement chez de petits producteurs.
D’autre
part, la réalisation de ces créatures nécessite un appareillage
inventé spécialement et assez lourd à installer et utiliser : Une
cuve contenant une grand volume d’eau est combinée avec un système
de miroirs et d’éclairages. C’est pendant le hasard d’un instant
que les morceaux d’animaux maintenus groupés manuellement produisent
l’image d’une créature hybride totalement inédite. Ils prennent
donc apparence de vie dans l'eau, à partir de morceaux d'animaux
morts, comme Frankenstein dans sa cuve de liquide amniotique...
Ce
procédé de prise de vue, qui ne permet pas de savoir précisément,
avant le dernier instant, quel sera l’aspect de l'être créé
procure, par cette part de hasard, une sorte de plaisir et d'excitation
comparable à celui provoqué par l’apparition de l‘image lors d’un
développement photographique. Le résultat est ainsi obtenu directement
à la prise de vue. Les images ne sont pas manipulées numériquement.
C’est un point important, même si je ne refuse pas d’utiliser cet
outil pour peaufiner le résultat final. Je ne crois pas, d’ailleurs
qu’un logiciel de traitement d’image pourrait produire un tel effet
d’optique : Celui d’une symétrie axiale,mais « souple ». Une symétrie
organique, se fondant naturellement avec les corps les plus divers
des monstres.
La fluidité et la souplesse dans le reflet, seul un liquide peut
l’offrir. Les filtres de symétrie proposés par les logiciels, empêchent
par leur trop grande droiture et perfection, l’impression de vivant.
Tantôt inquiétantes, tantôt drôles, parfois obscènes ou gore, ces
étranges bestioles, jouent dans le champ des fantasmes et des angoisses.
L’ illusion de vie de ces êtres pose plusieurs questions : Qui sont
ils? Que font ils là? à quoi servent ils? D'où viennent ils? Que
vont ils faire?... Le drôle de regard de certains d’entre eux nous
laisse penser que peut être eux-même ne le savent pas.
Ces
êtres paraissent « ratés », du moins jamais vu. Ce sont des biofictions,
des « trans-animaux », transitoires à des post-animaux évolués.
Ce sont des essais ratés, des lapsus génétiques. Leur aspect réaliste
amplifient leur incongruité.
l’objectif de ces « biofictions » est le même que celui d'un film
ou d'un roman d'horreur ou de SF : Plus les trucages sont efficaces
pour rendre plausible la fiction, et plus le but d'emmener le spectateur
dans un imaginaire symbolique et signifiant est atteint.
Ces
images jouent avec les frontières entre : réel et artificiel, vivant
et mort et animal et humain et le rapport des contrastes entre :
couleur viande/couleur peau, solide/liquide, naturel/artificiel,
viande/piscine…
En
nous surprenant sur leur nature, ces êtres nous amènent à nous interroger
sur les questions de manipulations du vivant. Cette série sera à
terme constituée de 277 portraits de monstres, correspondant au
nombre d'essais qui ont été nécessaires avant de parvenir à cloner
Dolly...
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Dessins
et photos préparatoires
Recherche
pour "organismes 2ème génération
. encre sur papier
 
 |
éléments
animaux pour la création des
"Organismes 2ème génération"
Photos
numériques
|
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Bibliographie
"Les
particules élémentaires"
M. Houellebecq
"Le
neuromancien"
William Gibson
"Mono Lisa S'éclate"
William Gibson
"Lumière virtuelle"
William Gibson
"Gravé sur chrome"
William Gibson
"
Idoru"
William Gibson
"Truismes"
Marie Darrieusecq
"La
vie sous l'écorce"
J.Lacarrière
«Méthamorphoses et clonage»
du 25 mai au 2 septembre 2001musée d'art contemporain de Montréal
« Le corps mutant »
du 12 octobre au 25 novembre Galerie Enrico Navarra
Paris
« Le Corps » les grands maîtres de la photo
(éd. Assouline)
« Technoromantisme »
de Stéphan Barron à paraître aux éditions DISVOIR
«
Anthropologie du corps et modernité »
de David Lebreton (éd quaridge)
|
"
La méthamorphose "
Kafka
"
Ubik "
philip K Dick
" Le voyage gelé "
philip K Dick
"Le
maître du haut château"
Philip K Dick
"Les
Olympiades truquées"
Joêlle Wintrebert
"Les
plus qu'Humains"
Theosore Sturgeon
"Frankenstein"
Marie Shelley
"
Frères de chair"
Michael Marschal Smith
« Copies conformes » d'Axel Kahn
«Tout non, peut être,»
Seuil, 1991 de Henri Atlan
«Les étincelles du hasard, »
Seuil 1999 de Henri Atlan
«Le clonage humain»
Seuil 1999 -
«
Les imaginaires du corps »
tome 2 art / sociologie / anthropologie ouvrage
collectif coordonné par Claude Fintz (éd. De l'Harmattan)
|
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Questions
centrales, domaines de travail, hypothèses....
-
Quelles sont aujourd'hui les possibilités de manipulations du vivant
?
- Qu 'en sait le public , (comment circulent ces informations )?
- Comment l'opinion publique perçoit- elle ces avancées scientifiques
?
- Quelles questions ces nouvelles possibilités soulèvent elles ?
- Quelles notions remettent elles en cause ? - De quelles modifications
sur l'homme seront-elles la cause ?
- Comment l'art peut il s'impliquer pour appuyer une utilisation
responsable, éthique et écologique de ces nouvelles possibilités?
- Quels langages les plus pertinents les artistes peuvent-ils adopter
pour optimiser la lisibilité et l'efficacité d' un tel message ?
- Quelles sont les évolution de notre rapport au corps humain,
comment dette évolution apparait ellel à travers l'art
?
Sur
le corps
aujourd'hui criblé,implanté,percé...
devient virtuel (web,cybersex)Simulé, il se dissout et s'absente.
l'identité est menacée par le clonage.
Sur les NT et la science
Quelles notions d'une éthique nouvelle
Les NT maintenant remettent en causes nos relations à l'esprit
et au corps.
La technologie nous fait voir les choses autrement.cf r.berger "art
et tech au seuil du XXIème"
Les réussites et les échecs des sciences sont directement liés au
contexte de nos valeurs, du climat politique , économique,philosophique.
Objectifs
:
Ma démarche a pour origine le constat suivant : Les recherches sur
les biotechnologies et la génétique ont incroyablement évolué
ces dernières années. Le grand public connaît mal la nature exacte
de ces découvertes et leurs conséquences potentielles sur notre
avenir, alors que l’extension du savoir humain à la source même
du vivant aura probablement des implications multiples :
: biologiques avec la nature du vivant, philosophiques avec l’ origine
de la vie et son sens, sociales avec les relations aux biotechnologies.
Etant donné l’importance de ces enjeux, je pense qu’une responsabilisation
de l'opinion publique par toutes les formes de communication existantes
est indispensable, pour que la réflexion et les choix concernant
le développement et l’utilisation de ces nouvelles technologies
soit le fait d’une société au sens le plus large possible et ne
soit pas réservés à une élite.
Je
travaille pour trouver un langage plastique qui me permette d'alerter
mes contemporains sur la nécessité d’investir cette situation qui
nous concerne tous directement. Mes productions sont surtout actuellement
des images photographique numériques et argentiques. Par l'intermédiaire
de l' ambiguïté de ces « bio-fictions », je souhaite poser un regard
critique sur ces sciences et leurs implications, et encourager chacun
à se questionner et se renseigner sur leur potentialités réelles.
Une telle démarche serait une première étape vers une responsabilisation.
Pour que cela soit possible, les propositions plastiques ne doivent
ni aduler les sciences en les illustrant, ni rejeter en bloc leur
utilisation. Le ménagement d'une distante critique est essentiel.
Aussi,
il me faut me documenter en permanence sur le sujet afin de pouvoir
questionner et argumenter mon positionnement . La génétique et les
biotechnologies nous offrent de nouveaux pouvoirs sur les êtres
vivants et donc, sur nous mêmes. Notre façon de les aborder est
délicate et controversée. Les politiques à appliquer dans ces domaines
sont tout juste esquissées et absolument pas accordées. Nous avançons
sur un terrain sensible et inexploré, fascinant, attirant et dangereux,
vecteur de toute sorte d 'angoisses et fantasmes. J'assimile cette
porte ouverte à l'imaginaire comme le lieu propice à une réelle
stratégie plastique pour aborder la réalité. En effet, c'est en
entrant en résonnance avec nos peurs et nos fantasmes, que de telles
images pourraient nous aider à les dépasser.
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Citations
"...Pour faire pleinement corps à l'existence on multiplie
les signes de son existence sur son corps..."
David Lebreton
en parlant de l'art contemporain :
"... et cette autre scènereprend à sa manière
de grands enjeux sociaux et culturels dont ils expérimentent
ludiquement les conséquences en avant courreurs du monde
à venir..."
Freud
"...l'artiste est un guide dans l'évolution qui extrapole
et imagine de nouvelles trajectoires (...) un sculpteur génétique
qui restucture et hypersensibilise le corps humain; un architecte
des espaces intérieurs du corps;un chirurgien primal qui
implante des rêves et transplante des désirs ; un alchimiste
de l'évolution, qui déclenche des mutationset transforme
le paysage humain..."
Stelarc
"L'art
garantit la santé mentale"
Louise
Bourgeois
" Le progrès en art ne consiste pas à étendre ses limites mais à
les mieux connaître. "
Braque
"
...dans une situation qui s'éloigne de plus en plus de la linéarité,
il apparaît que les nouvelles technologies (pour résumer d'un mot
l'innovation généralisée qui est devenue nôtre) ne peuvent plus
être tenues, comme elle l'ont été jusqu'ici, comme des perfectionnements
instrumentaux. Au seuil critique qu'elles ont atteint, elles restructurent
non seulement le champ des techniques, mais l'ensemble de nos faits
et gestes individuels et collectifs, à tous les niveaux et dans
tous les domaines, remettant ainsi en cause nos relations tant à
l'esprit qu'à notre corps. "
R.
Berger
"
la technologie n'est pas, contrairement à l'idée qu'on s'en fait,
et dans laquelle on persiste, purement instrumentale, mais qu'elle
a vertu épistémologique. Au sens propre, la technologie, non seulement
produit des objets autres, mais nous fait voir les choses autrement.
"
R.
Berger
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